Un peu de neige sur ma mère...

Je suis née en novembre 1938. A 6 mois, dans les bras de ma mère, devant la maison de ma grand mère, la villa les Fleurettes que j'ai été revoir il y a quelques temps, je me laisse vivre, au soleil.

J'ai plusieurs souvenirs de ma famille dans mon enfance vécue à Chassin, tout près de Biarritz, dans le département des Pyrénées Atlantiques.Des souvenirs comme des flash un peu brumeux mais tellement vivants.

Mes trois plus anciens souvenirs, remontent à la guerre de 39/45.

C'est en 1943, j'ai 5 ans. Mon père et les voisins creusent une profonde tranchée dans le jardin. Pour moi, c'est comme s'ils voulaient faire une cabane sous la terre et ça m'intrigue. Ma mère m'explique que quand on entend la sirène, il faut aller vite dans la maison sous la terre - Là on se cache - pour éviter les obus et les bombes qui font mal, et qui sont lancés par les avions allemands

Quelques temps plus tard, je suis devant notre maison, tenant dans la main un morceau de fer brillant, éclaté et abîmé ramassé sur le bord de la route Ma mère s'approche et me l'ôte des mains, très en colère en me disant "Ne touche pas ça, c'est un morceau d'obus, tu vas te faire mal" . Je vois encore l'effroi de son visage. Je ne savais bien sûr pas ce que c'était un obus, ni un morceau d'obus dont j'ai appris plus tard qu'on disait un éclat d'obus. Mais j'ai compris à partir de ce jour-là ce que pouvait être le danger et que c'est pour cela qu'on se cachait dans le jardin. Tout d'un coup le mal, le danger prenait une réalité toute proche

Un après midi de 1945, je regarde, derrière la vitre, sur la route nationale, des hommes en uniforme qui passent, à pied et descendent vers Bayonne. J'entends alors ma mère me dire "baisse ce rideau. Il ne faut pas qu'on te voit" . C'est bien plus tard, que j'ai compris que ces hommes en uniforme était des soldats allemands qui "repartaient chez eux"

Ces trois souvenirs là sont lourds et sont liés à la guerre. Ils ne me laissent aucun plaisir.

Par contre, J'ai 7 ans lors de mon premier souvenir heureux.

Depuis plusieurs jours, il neige et il fait froid. Avec mes deux soeurs, emmitouflées dans nos manteaux et nos tabliers d'écolier, chaussées de galoches à la semelle de bois, un ruban rose pour tenir nos cheveux, nous jouons avec la neige.

Ma mère nous accompagne et vient nous chercher à l'école , toujours par le chemin le plus court. Il fait froid, il faut rentrer vite à la maison. 'ai repéré, dans une petite venelle qui n'est pas sur notre chemin, des sapins dont les branches plient sous le poids de la neige. ça doit être bien de tirer sur les branches pour faire tomber la neige. J'insiste pour faire un détour par la venelle. "Maman, faisons le grand tour pour revenir à la maison? C'est beau la neige et patati et patata" tellement que nous prenons la venelle. Comment une mère peut-elle résister à la prière de ses enfants ?

Arrivées à la hauteur des sapins, je saute pour tirer la branche et la tête de ma mère devient toute blanche - pleine de neige - à sa grande surprise. Elle ne s'attendait pas à cela. Nous avons tellement ri, mes soeurs, ma mère et moi.

C'est un moment de pur bonheur qui est resté gravé dans ma mémoire et qui me revient de temps en temps - quand je me rappelle de ma mère et de mes galoches aux semelles en bois qui faisaient clic-clac quand je marchais, et de la neige qui tombait sur ma mère.

J'ai d'autres souvenirs de la vie de ma famille, une famille nombreuse de 6 enfants... le goût de l'omelette aux pommes de terre et de la salade de laitue que faisait ma mère et dont je n'ai plus retrouvé le même goût plus tard, l'odeur du pot au feu sur le cuisinière, la lessive sur le muret en pierre devant la maison où ma mère brossait à la main les pantalons de travail de mon père, la grande table pour les repas et la place de mon père où l'on n'apercevait que ses mains tenant un journal.

 Il lisait le journal à table, au moment du repas.. Au début ça m'étonnait... après on s'y fait.

Et encore beaucoup d'autres souvenirs sur mon travail de secrétaire comptable et d'employée de maison et sur mes activités extérieures et mes voyages qui m'ont appris le vrai sens du partage.

A cette époque, de 1948 à 1965 nos bonheurs étaient simples (quelques chocolats et une mandarine à Noël), notre vie heureuse et difficile. Mais tout cela fût une bonne école pour ma vie future 

 

1955 - l'année duC.A.P. que je passe aux Rocailles à Biarritz

Après mon CAP en 1955, je suis embauchée à Biarritz, dans l'entreprise de peinture Fortuné et fils comme employée aux écritures, le 1er octobre 1955 jusqu'au 31 mai 1963.

 

quelques souvenirs des années à Sainte Bernadette